vendredi 5 octobre 2012

Philosopher conduit-il au bonheur ?


Nous avons vu dans le cours intitulé : Pourquoi philosopher ? que la philosophie permettait de fonder son jugement et donc de se libérer de la tutelle mentale dans laquelle on peut se trouver (et dans laquelle certains veulent nous maintenir...). La philosophie comme exercice de la raison ouvre à la liberté. Elle permet peut-être également de déterminer ce qui peut faire notre bonheur. La philosophie ne rendrait pas heureux mais elle permettrait à celui qui s'y consacre de savoir quoi faire pour le devenir. Telle est l'idée proposée par Descartes dans l'extrait suivant. Il est difficile mais ne vous découragez pas devant le style ancien et pourtant si clair et structuré de l'écriture de Descartes. Les questions qui suivent l'extrait doivent guider votre compréhension.

Descartes, Lettre-Préface aux Principes de la philosophie :

Et outre cela que, pour chaque homme en particulier, il n’est pas seulement utile de vivre avec ceux qui s’appliquent à cette étude, mais qu’il est incomparablement meilleur de s’y appliquer soi-même ; comme sans doute il vaut beaucoup mieux se servir de ses propres yeux pour se conduire, et jouir par même moyen de la beauté des couleurs et de la lumière, que non pas de les avoir fermés et suivre la conduite d’un autre ; mais ce dernier est encore meilleur que de les tenir fermés et n’avoir que soi pour se conduire. C’est proprement avoir les yeux fermés, sans tâcher jamais de les ouvrir, que de vivre sans philosopher ; et le plaisir de voir toutes les choses que notre vue découvre n’est point comparable à la satisfaction que donne la connaissance de celles qu’on trouve par la philosophie ; et, enfin, cette étude est plus nécessaire pour régler nos mœurs et nous conduire en cette vie, que n’est l’usage de nos yeux pour guider nos pas. Les bêtes brutes, qui n’ont que leur corps à conserver, s’occupent continuellement à chercher de quoi le nourrir ; mais les hommes, dont la principale partie est l’esprit, devraient employer leurs principaux soins à la recherche de la sagesse, qui en est la vraie nourriture ; et je m’assure aussi qu’il y en a plusieurs qui n’y manqueraient pas, s’ils avaient espérance d’y réussir, et qu’ils sussent combien ils en sont capables. Il n’y a point d’âme tant soit peu noble qui demeure si fort attachée aux objets des sens qu’elle ne s’en détourne quelquefois pour souhaiter quelque autre plus grand bien, nonobstant qu’elle ignore souvent en quoi il consiste. Ceux que la fortune favorise le plus, qui ont abondance de santé, d’honneurs, de richesses, ne sont pas plus exempts de ce désir que les autres ; au contraire, je me persuade que ce sont eux qui soupirent avec le plus d’ardeur après un autre bien, plus souverain que tous ceux qu’ils possèdent. Or, ce souverain bien considéré par la raison naturelle sans la lumière de la foi, n’est autre chose que la connaissance de la vérité par ses premières causes, c’est-à-dire la sagesse, dont la philosophie est l’étude.

Questions :
  1. Quels sont les termes de la comparaison développée par Descartes dans les premières lignes? Pourquoi ne peut-on se contenter d'écouter l'avis des autres?
  2. Qui du plaisir des yeux ou de la satisfaction de la connaissance est supérieur pour Descartes ? Justifiez votre réponse.
  3. Qui est en mesure de philosopher? Citez une phrase montrant qu'il y a pour Descartes un désir inné de philosopher?
  4. Qu'est-ce qui fait la différence des hommes et des animaux?
  5. Que désignent « les lumières de la foi »? Faut-il prendre en compte leur discours?

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